La crise du capitalisme et la perspective révolutionnaire en Hongrie


Dr. Gyula Thürmer, président du Parti Communiste Ouvrier Hongrois.

Les forces du capitalisme en Europe et en Hongrie font d’énormes efforts pour cacher le fait que le capitalisme contemporain traverse une crise profonde. Elles ne peuvent nier l’existence des graves problèmes du capitalisme, mais essaient de prouver que tous ces problèmes peuvent être résolus par des réformes capitalistes dans le cadre même du capitalisme. Et, en vérité, la grave crise interne du capitalisme ne peut être résolue par les réformes capitalistes traditionnelles. La perspective d’une révolution pour résoudre les problèmes du capitalisme se mue de plus en plus en réalité.

La Hongrie est l’un des éléments les plus faibles du capitalisme européen contemporain. Le capitalisme hongrois traverse une crise profonde, indépendamment de la crise mondiale, mais cette crise a encore été aggravée par la crise générale du capitalisme. Elle est loin d’être résolue et personne ne peut prévoir ses conséquences. Dans de telles circonstances, nous ne devrions pas seulement critiquer le système capitaliste, mais nous devrions également faire voir aux gens la possibilité réelle qu’il y a d’établir un monde nouveau. Nous devrions faire valoir le socialisme en tant que réelle alternative au capitalisme existant.

Cela signifie que le mouvement communiste en Hongrie entre dans une situation nouvelle, c’est-à-dire qu’il va être confronté à de nouvelles possibilités et de nouvelles tâches.

La crise du capitalisme hongrois

Le capitalisme hongrois est en crise et la crise générale du capitalisme international aggrave encore cette crise. La crise du capitalisme hongrois contemporain peut s’expliquer par les facteurs suivants :

 

1. La majorité écrasante de l’économie (industrie, système financier, commerce et services) de la Hongrie a été vendue au capital étranger.

La Hongrie a été le premier pays de la Commission économique des Nations unies pour l’Europe (CEE-ONU) à ouvrir ses portes aux investisseurs étrangers en 1989. Selon les statistiques de la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), les investissements étrangers directs (IDE) en Hongrie, à la fin des années 1990, représentaient 1,7 pour cent du PNB hongrois. Aujourd’hui, on en est à plus de 70 pour cent. Le pourcentage moyen de l’UE est de 40,9. Celui de la Roumanie de 36,7.

La quasi-totalité des banques appartient au capital international, 80 pour cent de la production industrielle vient de sociétés multinationales. L’économie hongroise dépend bien plus du capital étranger que celle de tout autre pays européen. Il existe un réel danger, après 2011, de voir l’agriculture hongroise elle aussi tomber aux mains du capital étranger.

Le rôle décisif du capital étranger est l’une des caractéristiques du capitalisme hongrois. Il y a vingt ans, la contre-révolution capitaliste fut le résultat de l’activité du capitalisme international, de la trahison interne des forces révisionnistes du parti communiste au pouvoir et de l’activité de l’opposition bourgeoise.

Il n’y avait pas en Hongrie de puissante classe capitaliste bourgeoise. La nouvelle classe capitaliste fut créée en partie avec les éléments de l’ancienne élite dirigeante du système socialiste, qui utilisèrent leur position politique pour prendre part activement à la privatisation de la propriété d’État, en partie avec des intellectuels et des entrepreneurs de la période socialiste et en partie avec les nouvelles générations entrées en scène au cours des deux dernières décennies.

Le rôle particulièrement important du capital multinational résulta de divers moments clés. D’abord, les forces capitalistes étaient conscientes que l’ère socialiste avait été une période faste de l’histoire hongroise et que les forces sociales de la société socialiste, la classe ouvrière et la paysannerie des coopératives étaient assez fortes. Les forces capitalistes étaient intéressées par la liquidation de ces classes et groupes sociaux. Elles ne virent qu’une seule voie, pour y arriver : impliquer le capital multinational. Ensuite, les intellectuels de tendance libérale avaient toujours été orientés vers les États-Unis, Israël et les forces capitalistes internationales et avaient toujours considéré le rôle important du capital étranger comme une chose absolument normale.

Tous les gouvernements hongrois ont soutenu les investissements étrangers en octroyant des subsides en cash fixés par décision unilatérale du gouvernement, des dégrèvements fiscaux pour le développement, des subsides à la formation, des subsides à la création d’emplois, etc.

La classe capitaliste hongroise comprend divers groupes. Primo, un groupe restreint, mais influent de gros capitalistes qui occupent des positions dans le secteur financier, le commerce, les services. Ils sont étroitement liés au capital multinational. Secundo, des centaines de milliers de minuscules, petites et moyennes entreprises engagées dans l’industrie et le commerce. Leur position est très faible. Elles subissent la double pression du capital européen et du capital chinois. Sans un soutien solide de l’État, elles sont condamnées à mort.

Ces développements ont de lourdes conséquences aujourd’hui, à l’heure où le système capitaliste est en crise. Primo, le capital étranger contrôle les secteurs de base de l’économie hongroise. Il détient le pouvoir absolu sur le secteur financier et il contrôle le secteur le plus sensible, le commerce intérieur. Dans la mesure où il n’existe pas de forte production nationale, la Hongrie n’a que très peu de possibilités de se défendre par ses propres moyens. On peut voir clairement que les sociétés multinationales qui tentent de résoudre leurs propres problèmes réduisent la production et ferment leurs sites en Hongrie, ce qui contribue à faire monter le chômage.

 

2. Le fossé entre les groupes riches et les groupes de la société s'est élargi considérablement.

C’est une raison supplémentaire de la crise du capitalisme hongrois. L’accumulation originale de capital signifiait que le peuple avait été privé de ses ressources. C’est le résultat de la politique d’inflation, de la politique fiscale, de la politique du crédit des gouvernements capitalistes de ces vingt dernières années.

La Hongrie compte 10 millions d’habitants, dont 9 millions peuvent être considérés comme vivant à un niveau très limité, voire sous le seuil de pauvreté, et un million pouvant affirmer qu’ils sont sortis en vainqueurs des changements sociaux, de l’entrée au sein de l’UE, etc.

Comme le montrent les chiffres suivants, le nombre des gens désespérément pauvres, autrement dit, vivant sous le seuil de pauvreté, a considérablement augmenté ces dernières années. (Le seuil de pauvreté représente la somme des revenus d’une famille permettant à tous les membres de celles-ci de se nourrir, se vêtir, se loger et payer son électricité.) Selon des statistiques fiables, en 1993, pas moins de 27 pour cent de la population hongroise vivait sous le seuil de pauvreté. Il y avait environ un million de pauvres, en 1980. Aujourd’hui, leur nombre dépasse les 2,5 millions. Les 10 pour cent des personnes les plus riches de la société gagnent 7,3 fois plus que les 10 pour cent les plus pauvres. Ce sont peut-être les enfants, qui connaissent la situation la plus dramatique. Près de la moitié de la population de moins de 18 ans fait partie d’une famille vivant sous le seuil de pauvreté. Ces dernières années, les revenus réels de 53 pour cent des ménages ont diminué. Cela veut dire, pour ces familles, que la croissance du revenu a été plus lente que la hausse des prix.

Le nombre de pauvres dits à long terme est en hausse. Ces pauvres à long terme en Hongrie constituent plusieurs groupes sociaux distincts : les sans-logis, la population rurale et plus particulièrement celle des microcommunautés, les ouvriers agricoles sans emploi ou retraités du marché de l’agriculture, les ménages avec plus de trois enfants, les familles monoparentales, les femmes âgées vivant seules et les Roms (Tsiganes). Un tiers des pauvres à long terme appartiennent à l’ethnie rom, même si ce groupe ne constitue qu’environ 5 pour cent de la population hongroise.

Dans les premiers mois de 2009, le revenu mensuel moyen en Hongrie était de 402 euros. Les travailleurs manuels recevaient 295 euros, les travailleurs intellectuels 511 euros. Le salaire minimal est de 250 euros. On devrait prendre en considération le fait que les prix à la consommation sont pratiquement au niveau de ceux de l’Union européenne.

Ces vingt dernières années, la classe ouvrière a perdu les économies qu’elle avait mises de côté à l’époque socialiste. Aujourd’hui, les travailleurs utilisent leurs dernières réserves et nombreux sont ceux qui n’ont même plus de réserves du tout. On peut dire la même chose des intellectuels, des enseignants et des travailleurs médicaux. La majeure partie de la classe ouvrière et des intellectuels a contracté récemment d’importantes dettes pour acheter un appartement, une voiture, un poste de télévision ou juste de quoi couvrir les frais de l’existence quotidienne. Ces groupes sociaux ne peuvent mobiliser de nouvelles ressources afin de faire face aux conséquences de la crise actuelle.

 

3. La troisième raison et caractéristique de la crise du capitalisme hongrois, c’est le degré extraordinairement élevé de la corruption qui règne.

La Hongrie figure au 39e rang, sur 179 pays, dans le Corruption Perceptions Index de Transparency International pour 2007. Malgré les lois contre la corruption, l’absence de transparence suscite des rumeurs persistantes de corruption dans les achats de gouvernement.

Les raisons de ces phénomènes sont liées au capitalisme hongrois même. Primo, la privatisation de la propriété de l’État a pratiquement été synonyme de liberté de vol. Aujourd’hui, les différents cercles politiques et économiques se battent pour une plus grosse part de l’argent de l’Union européenne, des commandes de l’État et des investissements les plus importants. Secundo, le système des lois est très confus, ce qui profite à tous ceux qui opèrent dans l’économie au noir. Aujourd’hui, environ 30 pour cent du PIB est produit dans l’économie au noir. Tertio, l’actuel système politique et juridique est la résultante d’un compromis conclu il y a vingt ans entre différents groupes de la classe capitaliste. Bien des éléments de cette dernière ont déjà perdu leur vitalité. Il résulte de cette situation que l’État capitaliste ne peut remplir certaines de ses fonctions fondamentales, y compris le travail de la police, les tâches des administrations locales, etc

Les voies possibles du développement

Le développement futur du capitalisme hongrois dépend du développement du capitalisme international et des processus en cours dans les différents groupes sociaux de la Hongrie.

 

1. Les forces capitalistes internationales ne veulent pas perdre la Hongrie.

La Hongrie a été l’un des premiers pays à passer du socialisme au capitalisme et elle a servi de preuve du caractère correct de la politique américaine et allemande de contre-révolution pacifique. C’est une première raison. La seconde, c’est que le capital international a investi des montants énormes en Hongrie. Actuellement, la dette de la Hongrie équivaut à 97 pour cent de son PIB. Les forces capitalistes internationales aimeraient récupérer leur argent. C’est pourquoi elles sont prêtes à apporter leur aide. En 2009, la Hongrie a reçu 20 milliards d’euros en crédit stand-by.

Le FMI et les forces capitalistes internationales désirent une situation politique plus ou moins stable, en Hongrie, une oppression de tous les mouvements anticapitalistes possibles, mais selon des « moyens conformes à ceux de l’Union européenne ». L’administration Obama semble mieux comprendre que les pays de l’Union européenne que l’effondrement du capitalisme hongrois peut mener à une série d’autres effondrements dans la région. Elle n’a pourtant pas pu convaincre ses partenaires de l’Union européenne d’investir plus encore dans la consolidation du capitalisme hongrois.

Les États-Unis sont absolument indifférents quant au groupe de la classe capitaliste qui dirige politiquement la Hongrie. Ils exigent que tout gouvernement hongrois leur soit fidèle, de même qu’à l’Otan, aux opérations militaires de laquelle la Hongrie est tenue de participer. En politique interne, l’administration américaine attend une lutte conséquente et démonstrative contre l’antisémitisme et les forces communistes.

Les principaux pays de l’Union européenne n’expriment pas d’inquiétude particulière à propos de la situation du capitalisme hongrois. Selon leur expérience, ils sont convaincus qu’en Hongrie – membre de l’Union européenne et de l’Otan – il ne peut y avoir de révolution sociale ni même de soulèvement social de grande envergure. Les divers groupes politiques de l’Union européenne expriment leur sympathie envers plusieurs partis politiques hongrois. Il semble que, pour l’instant, l’Allemagne et la France ne soient pas satisfaites du tout de la performance du Parti socialiste hongrois et qu’elles ne s’opposeraient pas à un changement de gouvernement.

 

2. La classe capitaliste hongroise consiste en divers groupes.

Le Parti socialiste hongrois (MSZP) et l’Alliance des libres démocrates (SZDSZ) représentent le grand capital étroitement lié au capital multinational. Économiquement et politiquement, ils sont traditionnellement orientés vers les États-Unis et Israël.

Depuis longtemps, la coalition entre socialistes et libéraux constitue une solution optimale aux yeux des forces capitalistes internationales. La Hongrie participe activement à toutes les actions militaires des États-Unis et de l’Otan, depuis le Kosovo jusqu’à l’Afghanistan. La majeure partie de l’économie hongroise a été privatisée, vendue au capital étranger sous les gouvernements socialistes et libéraux, tout d’abord entre 1994 et 1998, puis après 2002. Le gouvernement dirigé par le parti socialiste hongrois a été en mesure de subordonner aux MSZP toutes les organisations politiques et civiles de gauche, à l’exception du Parti  communiste ouvrier hongrois (PCOH). La coalition des socialistes et des libéraux a déclaré la guerre à l’antisémitisme et a garanti d’excellentes possibilités de développement aux personnes faisant partie de la communauté juive en Hongrie. Les statistiques de diverses organisations juives évaluent la population juive actuelle en Hongrie, entre 50.000 et 200.000 individus. Les taux d’intermariage chez les Juifs tournent autour de 60 pour cent.

Le gouvernement MSZP-SZDSZ consent des efforts importants, entre autres, pour modifier la constitution et déclarer que « la négation de l’Holocauste et l’incitation publique à la haine raciale » sont considérés comme des délits. Le gouvernement, qui affirme que la Hongrie est l’endroit d’Europe où certains des pires incidents néo-nazis ont eu lieu ces derniers mois, a prévu la réforme comme une réponse aux outrages publics lors de provocations récentes.

Malgré tous ces développements, les forces capitalistes internationales ne sont pas satisfaites des performances actuelles de la coalition socialiste et libérale. La politique économique néolibérale a abouti à une grave détérioration du niveau de vie des gens. Des millions de personnes sont mécontentes et se mettent à afficher sous diverses formes leur attitude antigouvernementale et même anticapitaliste. La détérioration des conditions de vie a renforcé deux tendances, en Hongrie, l’antisémitisme ainsi que des actes d’hostilité à l’égard des Roms.

L’Union civique hongroise Fidesz représente bien davantage les petits et moyens capitalistes, bien qu’elle ne rejette pas le grand capital. Elle est plus orientée vers l’Allemagne et l’Union européenne en général. La Fidesz, qui était à l’origine un parti libéral est aujourd’hui un parti qui tente  d’unifier toutes les forces conservatrices et nationalistes. Elle collabore étroitement avec le Parti populaire démocrate-chrétien (KDNP).

Quand la Fidesz a été au pouvoir, de 1998 à 2002, elle a comblé fondamentalement les attentes du capital international. La Hongrie a pris une part active dans la guerre contre la Yougoslavie et dans le « processus de démocratisation » de l’Europe de l’Est. La politique du gouvernement de la Fidesz consistant à soutenir les aspirations des minorités hongroises en Roumanie, en Slovaquie et dans d’autres pays en faveur d’une autonomie nationale a valu nombre de critiques de la part de certains pays de l’Union européenne. Les cercles politiques américains ont critiqué la Fidesz parce que, selon leurs estimations, son gouvernement ne combattait pas suffisamment l’antisémitisme. Tout en soutenant le capital multinational, la Fidesz a appliqué un grand nombre de mesures de soutien au capital hongrois et, avant tout, aux capitalistes moyens.

Depuis 2002, la Fidesz a prouvé qu’elle était le plus important parti d’opposition et qu’elle était capable d’influence les processus politiques en Hongrie. Elle a été l’organisatrice de nombreuses manifestations antigouvernementales en 2005 et 2006, a lancé un référendum sur des problèmes fondamentaux comme la politique en matière d’enseignement et de soins de santé du gouvernement MSZP-SZDSZ. Le congrès de la Fidesz a déclaré qu’il était nécessaire de créer une « nouvelle majorité » comprenant non seulement les alliés traditionnels de la Fidesz, mais d’autres forces politiques aussi tels les syndicats, les organisations citoyennes, etc.

À la même époque, la Fidesz a prouvé qu’elle ne voulait pas sortir du cadre de la démocratie parlementaire ni violer les règles générales du comportement politique au sein de l’Union européenne. La Fidesz n’a pas soutenu les importantes manifestations des syndicats de 2007 à 2009, bien qu’elles eussent fourni de larges possibilités. L’idée d’une nouvelle majorité n’a pas été concrétisée et la Fidesz ne s’est pas ouverte de façon très voyante aux autres partis politiques.

Les deux groupes de la classe capitaliste en Hongrie, représentés par les partis politiques de case, ont à la fois des intérêts communs et des intérêts différents. Les deux groupes sont intéressés par le maintien du système capitaliste. Ils ne veulent pas changer l’actuel système politique. C’est pourquoi le seuil de 5 pour cent pour entrer au Parlement ne sera pas modifié. Tous les groupes de la classe capitaliste luttent pour une meilleure position dans la privatisation, dans l’obtention de l’agent de l’Union européenne, et dans les grands investissements de l’État. Dans le même temps, tous savent que leur combat interne ne peut menacer l’intérêt commun de la classe capitaliste. Le HSP aimerait garder le pouvoir et la Fidesz aimerait le détenir. Tous deux comprennent que l’Union européenne ne permet de recourir qu’à des méthodes parlementaires.

Le MSZP utilise différentes méthodes, pour conserver le pouvoir. Primo, il est intéressé par les activités du Mouvement pour une Hongrie meilleure (le Jobbik). Le Jobbik n’est autre que la troupe de choc de la classe capitaliste. Il joue un rôle semblable à celui du MIÉP dans le temps. Le Jobbik remplit différentes fonctions. En jouant avec les sentiments nationaux et en utilisant des slogans radicalement anticapitalistes, il peut manipuler le peuple. Il est capable de rafler des votes à la Fidesz. En même temps, il se sert d’autres « armes » que n’utilisent pas les autres forces capitalistes. Il s’agit de ses slogans anticapitalistes, antisémites et anti-roms. Il peut également rafler des voix aux forces communistes. En juin 2007, le Jobbik a créé officiellement la Magyar Gárda, la Garde hongroise, un mouvement paramilitaire extrémiste enregistré comme « organisation culturelle » destinée « à préparer la jeunesse mentalement et physiquement à des situations extraordinaires lors desquelles il pourrait être nécessaire de mobiliser le peuple ». Selon le récent rapport de l’Institut pour le progrès, il existe aujourd’hui en Hongrie une plus grande ouverture vers les mouvements extrémistes en raison de la pauvreté et des pertes d’emplois résultant de l’actuelle crise économique.

Secundo, les socialistes tentent d’obtenir toutes les voix de gauche. Ils n’ont pu subordonner le Parti communiste ouvrier hongrois au MSZP, mais ils ont pu créer en 2006 le « Parti ouvrier hongrois 2006 », qui est un parti révisionniste, critiquant verbalement le capitalisme, mais soutenant le gouvernement socialiste et libéral.

Tertio, ils ont contribué à la naissance de nouvelles organisations, comme le parti appelé « Il peut y avoir une autre politique » qui, en compagnie du Parti humaniste, peut créer une alternative aux libéraux.

 

3. Dans de telles circonstances, deux voies fondamentales s’ouvrent à la société hongroise : la voie du capitalisme et la voie de la révolution socialiste.

Du point de vue de l’alternative capitaliste, un fait est d’une importance décisive : le champ d’action du capitalisme hongrois est déterminé principalement par l’énorme influence économique du capital multinational dans l’économie hongroise, par la dépendance politique, militaire et idéologique de la Hongrie vis-à-vis des États-Unis, de l’Otan et de l’Union européenne.

Dans le cadre du développement capitaliste – nous insistons, à l’intérieur du capitalisme et non pas en tant qu’alternative au capitalisme – diverses voies sont possibles. L’une consiste à poursuivre la soumission de la Hongrie au FMI, à l’Union européenne et aux autres centres capitalistes.

Les gouvernements hongrois serviront les intérêts du capital international en libéralisation totalement tous les secteurs du marché hongrois, en liquidant les restes des entreprises hongroises, en supprimant toutes les formes de protestation des classes laborieuses. C’est la voie consistant à renoncer pleinement à la souveraineté nationale de la Hongrie, la voie de la limitation et de l’oppression des droits démocratiques.

Cette politique se poursuivra si les socialistes restent au pouvoir. Ils en parlent on ne peut plus clairement et ils le prouvent par leur politique actuelle.

Nous ne nous faisons pas d’illusions et nous ne le pouvons pas non plus : cette politique peut être ravivée sous l’une ou l’autre forme si la Fidesz vient au pouvoir. La Fidesz est aussi un parti du grand capital, à l’instar du MSZP. La seule différence entre eux, c’est que, dans la base sociale de la Fidesz, il y a beaucoup plus de représentants de la petite et moyenne bourgeoisie.

Les communistes hongrois ne devraient pas soutenir et ne soutiendront pas cette voie. Les communistes devraient savoir que la voie néolibérale, pro-FMI, va détériorer les conditions de vie du peuple et que cela pourrait aboutir à une radicalisation accrue des masses. Les communistes devraient se préparer à cette situation. Nous devrions combattre un tel développement qui mènerait à un virage radical à droite de la politique. Il n’y a pas de réel danger de voir des forces fascistes, voire de la droite radicale prendre le pouvoir. Les forces actuelles de l’extrême droite ne sont pas assez fortes et un tel développement aboutirait à une intervention immédiate de l’Union européenne, comme nous avons pu le voir en Autriche voici quelques années.

Mais il existe une menace réelle de voir les forces capitalistes utiliser la crise en Hongrie et le renforcement des forces d’extrême droite pour établir une « dictature démocratique » afin de « sauvegarder la démocratie ».

Dans la voie capitaliste du développement, nous pouvons également imaginer une voie qui offrirait plus d’opportunités au capital national, aux petites et moyennes entreprises hongroises. Nous ne pouvons pas non plus éliminer la possibilité que, pour éviter un ressentiment massif et l’éclatement de vastes conflits sociaux, le capital fasse certaines concessions aux masses et essaie de mitiger les problèmes sociaux et économiques des gens. En politique étrangère, il pourrait également arriver que la Hongrie poursuive un cours plus équilibré tout en gardant ses principaux engagements à l’égard de l’Union européenne et de l’Otan. Par exemple en développant certaines relations étroites avec les pays arabes et latino-américains. Nous pouvons observer le développement d’une alternative similaire dans le système capitaliste dans un certain nombre de pays de l’Amérique latine.

Cette voie est possible dans les conditions du capitalisme. L’actuel gouvernement et le Parti socialiste hongrois y sont opposés. Le principal parti de l’opposition, la Fidesz, qui représente les intérêts des moyens capitalistes hongrois, se dit prêt à limiter le capital multinational, à soutenir les entreprises hongroises, à limiter les revenus du gros capital et à donner plus aux larges masses. Il faudrait savoir, au cas où la Fidesz viendrait au pouvoir, ce qu’elle compte faire ou si elle cherchera un compromis avec le capital international.

Cette voie ne satisfait pas pleinement les intérêts de la classe ouvrière et elle ne signifie que des améliorations provisoires. Mais c’est une voie qui apporte certaines améliorations aux masses laborieuses. Elle permet au PCOH de coopérer avec la petite et la moyenne bourgeoisie sur base d’un combat commun contre le capital international, les supermarchés, l’exploitation étrangère.

Cette voie peut mener au succès si nous sommes capables de transformer le ressentiment du peuple en force organisée et forcer ainsi les gouvernements capitalistes à restreindre le capital. Le PCOH prend une part active dans le combat syndical, dans le mouvement des « défenseurs du foyer » (contre les expulsions), dans les actions citoyennes visant à accroître l’influence des communistes et de mettre sur pied les forces du ressentiment des masses.

Lénine a écrit ceci, dans « Deux tactiques de la social-démocratie dans la révolution démocratique » : « Le prolétariat doit faire jusqu'au bout la révolution démocratique, en s'adjoignant la masse paysanne, pour écraser par la force la résistance de l'autocratie et paralyser l'instabilité de la bourgeoisie. Le prolétariat doit faire la révolution socialiste en s'adjoignant la masse des éléments semi-prolétariens de la population, pour briser par la force la résistance de la bourgeoisie et paralyser l’instabilité de la paysannerie et de la petite bourgeoisie. » [1]

Une autre voie est celle de la révolution socialiste. Il est clair que les problèmes fondamentaux de la classe ouvrière ne peuvent être résolus qu’en empruntant la voie de la révolution socialiste et en renversant le capitalisme. Les communistes hongrois ont toujours eu cette position, mais, depuis la contre-révolution capitaliste de 1989-1990, nous n’avons plus parlé de la possibilité de la révolution socialiste. Aujourd’hui, nous devrions le faire !

« La crise actuelle est l’expression d’une crise plus profonde, inhérente au système capitaliste et qui prouve les limites historiques du capitalisme et la nécessité qu’il y a de le renverser par la révolution », pouvons-nous lire dans la déclaration commune des partis communistes et ouvriers à São Paulo. Nos partis ont également déclaré : « En insistant sur le fait que la faillite du néolibéralisme représente non seulement l’échec d’une politique de management du capitalisme, mais aussi celui du capitalisme même, et confiant dans la supériorité des idéaux et du projet communistes, nous affirmons que la réponse aux aspirations émancipatives des travailleurs et des peuples ne peut se trouver que dans la rupture avec le grand capital et avec les blocs et alliances impérialistes, et dans les transformations profondes à caractère libérateur et antimonopoliste. (…) Convaincus de la possibilité d’un autre monde, d’un monde libre de l’exploitation de classe et de l’oppression du capital, nous confirmons notre engagement à poursuivre la voie historique de la construction d’une nouvelle société libre de l’exploitation de classe et de l’oppression, c’est-à-dire le socialisme. »

Le PCOH continuera à suivre la voie de la révolution socialiste. Aujourd’hui, nous estimons que notre tâche fondamentale et la plus importante consiste à démontrer au peuple hongrois que le capitalisme n’est pas la seule façon de vivre. Nous devrions prouver que les capitalistes ne nous donneront jamais une vie meilleure, qu’ils ne nous donneront jamais une place dans les Parlements. Nous devrions obtenir tout cela via un combat conséquent et sérieux. Mais cette voie est une voie réaliste et nous pouvons créer un monde nouveau, le socialisme.

Naturellement, nous nous souvenons des mots de Lénine : « Chaque révolution signifie un changement de cap radical dans nos existences et dans celles d’un grand nombre de personnes. Tant que le temps ne sera pas mûr pour un tel changement de cap, aucune révolution ne pourra avoir lieu. » [2] Aujourd’hui, nous ne pouvons parler de situation révolutionnaire, en Hongrie. Mais nous pouvons parler de la possibilité de voir les développements généraux de la crise du capitalisme international et leurs conséquences en Hongrie mener à l’apparition d’une situation révolutionnaire.

Nous considérons que notre tâche principale consiste à préparer le parti communiste à une telle situation. Les expériences historiques montrent que les situations révolutionnaires réelles demeurent inutilisées si les circonstances subjectives n’existent pas en temps utile.

Nous renforçons notre éducation marxiste-léniniste. Les membres et militants du parti devraient comprendre la situation actuelle et le sens réel de la voie révolutionnaire.

Nous étudions l’expérience historique des révolutions socialistes en Hongrie dans le but d’utiliser ces expériences mêmes pouvant être appliquées aujourd’hui.

Nous étudions l’expérience des partis communistes de Grève, du Portugal, du Brésil, du Venezuela et d’autres pays à propos de la façon d’organiser et d’inciter les masses à une activité plus importante.

Le parti organise ses organes de direction sur une nouvelle base. Nous créons des « centres révolutionnaires locaux » avec les équipements mobiles d’information nécessaires.

Nous créons des « groupes de combat » mobiles, qui peuvent participer à différentes manifestations, actions de rue et événements de solidarité.

Nous construisons une nouvelle organisation de jeunesse avec des jeunes profondément dévoués à l’idée de la révolution.

Nous avons commencé à aller directement aux usines afin d’y rencontrer les travailleurs. Les expériences sont très positives.

Nous sommes ouverts à toutes les initiatives anticapitalistes, antimonopolistes et participons à toutes les actions sociales qui combattent les supermarchés, la politique néolibérale du logement, les expulsions des personnes qui ne peuvent payer leur gaz et leur électricité.

Nous créons un système plus efficace de médias alternatifs en utilisant l’hebdomadaire Szabadsag, Internet et d’autres moyens. Nous mettons en place un vaste système de pages d’accueil d’organisations locales en utilisant la technologie YouTube et d’autres technologies modernes sur Internet.

Nous luttons pour une coopération plus efficace entre les forces communistes sur la scène internationale. Le PCOH a quitté le Parti de la gauche européenne parce que nous ne sommes pas d’accord avec la politique révisionniste et opportuniste de ce parti. Nous sommes convaincus d’avoir besoin d’une « nouvelle culture politique européenne », mais nous devons mener un combat très conséquent contre le capitalisme, pour les droits des masses laborieuses. Nous ne devrions pas seulement critiquer le capitalisme, mais nous devrions organiser le combat quotidien des travailleurs. Nous voulons liquider le capitalisme, la Gauche européenne veut seulement le rendre meilleur. Nous nous appuyons sur les principes du marxisme-léninisme, la théorie et la pratique de la lutte des classes, les principes de l’internationalisme prolétarien. Malheureusement, la Gauche européenne s’appuie sur le réformisme. La gauche européenne combat le capitalisme uniquement en paroles, mais, dans la pratique, elle contribue à renforcer l’image « démocratique » de l’Union européenne, du Parlement européen et du système capitaliste en général.

Lénine a dit : « Il est impossible de prédire le temps et la progression d’une révolution. Elle est régie par ses propres lois plus ou moins mystérieuses. Mais quand elle vient, elle se déplace de façon irrésistible. » [3] Nous devrions nous y préparer.


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[3]